Les boutons d'après... Louis Pergaud !
La guerre des boutons
(suite et pas fin)
Les boutons
d'après Louis
SCOOP! La préface de l'auteur (Louis Pergaud -1882-1915) condamne sans appel les adaptations édulcorées actuellement existantes au cinéma...
Copié collé de la préface rédigée par l'instituteur écrivain, qui a vécu son enfance à la campagne:
« Préface
Tel qui s’esjouit à lire Rabelais, ce grand et vrai génie français, accueillera, je crois, avec plaisir, ce livre qui, malgré son titre, ne s’adresse ni aux petits enfants, ni aux jeunes pucelles.
Foin des pudeurs (toutes verbales) d’un temps châtré qui, sous leur hypocrite manteau, ne fleurent trop souvent que la névrose et le poison ! Et foin aussi des purs latins : je suis un Celte.
C’est pourquoi j’ai voulu faire un livre sain, qui fût à la fois gaulois, épique et rabelaisien, un livre où coulât la sève, la vie, l’enthousiasme, et ce rire, ce grand rire joyeux qui devait secouer les tripes de nos pères : beuveurs très illustres ou goutteux très précieux.
Aussi n’ai-je point craint l’expression crue, à condition qu’elle fût savoureuse, ni le geste leste, pourvu qu’il fût épique.
J’ai voulu restituer un instant de ma vie d’enfant, de notre vie enthousiaste et brutale de vigoureux sauvageons dans ce qu’elle eut de franc et d’héroïque, c’est-à-dire libérée des hypocrisies de la famille et de l’école.
On conçoit qu’il eût été impossible, pour un tel sujet, de s’en tenir au seul vocabulaire de Racine.
Le souci de la sincérité serait mon prétexte, si je voulais me faire pardonner les mots hardis et les expressions violemment colorées de mes héros. Mais personne n’est obligé de me lire. Et après cette préface et l’épigraphe de Rabelais adornant la couverture, je ne reconnais à nul caïman, laïque ou religieux, en mal de morales plus ou moins dégoûtantes, le droit de se plaindre.
Au demeurant, et c’est ma meilleure excuse, j’ai conçu ce livre dans la joie, je l’ai écrit avec volupté, il a amusé quelques amis et fait rire mon éditeur [Ceci par anticipation.] : j’ai le droit d’espérer qu’il plaira aux « hommes de bonne volonté » selon l’évangile de Jésus et pour ce qui est du reste, comme dit Lebrac, un de mes héros, je m’en fous.
L. P. »
Extraits choisis ou petite anthologie de la littérature française des campagnes... et de ses dialogues !
Notre cinéma Hexagonal accuserait-il 100 ans de retard sur 1912?
Paroles d'enfants:
"Et ça, ça n'est pas une mauvaise envie. Les femmes grosses, y en a qu'ont toutes sortes d'idées et des bien plus dégoûtantes, mes vieux ; moi j'ai entendu la bonne femme [Sage-femme.] de Rocfontaine qui disait à la mère que y en avait qui voulaient manger de la merde dans ces moments-là!
- De la merde !
- Oui !
- Oh !...
- Oui, mes vieux, parfaitement, de la merde de soldat même et toutes sortes d'autres saloperies que les chiens même ne voudraient pas renifler de loin.
- Elles sont donc folles à ce moment-là ? s'exclama Tétard.
- Elles le sont pendant, avant et après, à ce qui paraît.
- Toujours est-il que c'est mon père qui dit comme ça, et pour quant à y croire, j'y crois, on ne peut rien faire sans qu'elles ne gueulent comme des poules qu'on plumerait tout vif et pour des choses de rien elles vous foutent des mornifles.
- Oui, c'est vrai, les femmes c'est de la sale engeance!"
(...)
- Velri
Pourri
Traîne la Murie
À vau les vies [Vies, voies, chemins.]
- Ouhe !... ouhe !... ouhe !... fit derrière son chef le choeur des guerriers Longevernes incapable de se dissimuler et de contenir plus longtemps son enthousiasme et sa colère.
L'Aztec des Gués riposta :
- Longeverne
Pique merde,
Tâte merde,
Montés sur quatre pieux
Les diabl' te tir' à eux !
Et le choeur des Velrans applaudit à son tour frénétiquement le général par des Euh ! euh ! prolongés et euphoniques. Des bordées d'insultes furent jetées de part et d'autre en rafales et en trombes ; puis les deux chefs, également surexcités, après s'être lancé les injures classiques et modernes : Enfonceurs de portes ouvertes ! Étrangleurs de chats par la queue [De mon temps on ne parlait pas encore de roulure de capote ni d'échappé de bidet. On a fait des progrès depuis.]! etc., etc., revenant au mode antique, se flanquèrent à la face avec toute la déloyauté coutumière les accusations les plus abracadabrantes et les plus ignobles de leur répertoire :
- Hé ! t'en souviens-tu quand ta mère p... dans le rata pour te faire de la sauce !
- Et toi, quand elle demandait les sacs au châtreur de taureaux pour te les faire bouffer en salade !
- Rappelle-toi donc le jour où ton père disait qu'il aurait plus d'avantage à élever un veau qu'un peut [Vilain.] merle comme toi !
- Et toi ? quand ta mère disait qu'elle aimerait mieux faire téter une vache que ta soeur, passe que ça serait au moins pas une putain qu'elle élèverait !
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